🔶 Un passage des Sénégalais à Igoville : Mais pourquoi ?
Passage piéton entre la rue du Huit Mai et la rue des Platanes.
Des hommes venus d'Afrique, sont en effet venus combattre l’ennemi allemand dans l’hexagone durant la deuxième guerre mondiale, mais l’histoire de certains d’entre eux, est intimement liée avec celle de notre village.
Les précieuses archives de M. BOURGEAUX vont nous permettre de comprendre précisément pourquoi.
🔵 Sente des Sénégalais 👆
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🔸 Histoire des Tirailleurs Sénégalais et leurs implications dans les différents conflits
Le 21 juillet 1857, l'empereur Napoléon III signait un décret portant création d'un bataillon de tirailleurs sénégalais. Très vite, ce recrutement s'amplifia mais, quelle que fût l'origine ethnique de ces soldats issus de 17 pays de l'Afrique noire française, leurs unités conservèrent l'appellation de « Tirailleurs sénégalais ». Leur courage et leur fidélité furent tels que l'imagerie populaire les baptisa bientôt du surnom de « force noire ».
Les tirailleurs sénégalais ont joué un rôle actif dans la défense ou la reconquête du territoire national lors des deux conflits mondiaux.
Entre 1914 et 1918, sur les 161 250 tirailleurs recrutés, 134 000 interviennent sur différents théâtres d'opération, notamment aux Dardanelles et sur le front de France, à Verdun ou sur la Somme (1916), tandis que d 'autres servent outre-mer comme troupes de
souveraineté. Durant la Seconde Guerre mondiale, le nombre de tirailleurs sénégalais mobilisés est estimé à 179 000 hommes. Ils participent aussi bien à la bataille de France, en 1940, qu'à l'ensemble des combats menés par la France libre, intervenant notamment au Gabon (1940), à Bir Hakeim (1942), ou encore débarquant en Provence avec la première armée (1944).
Les tirailleurs interviennent également lors des deux grands conflits de décolonisation, en Indochine (1945-1954) et en Algérie (1954-1962)
🔸 Le 9 Juin 1940 à Igoville
M Michel DELAPORTE de St-Pierre-Les-Elbeuf et Maurice OZANNE, garde-champêtre des Authieux- Port-Saint-Ouen se retrouvent, après des dizaines d'années, à Igoville où ils habitaient tous deux, à une dizaine de mètres l'un de l'autre.
Ce 9 Juin 1940, la colonne allemande arrivait aux Authieux et à Igoville, pour se diriger vers Pont-de- l’Arche, Elbeuf et Oissel afin de traverser la Seine en évitant Rouen et sa défense au niveau des ponts. Mes deux témoins ont alors, à l’époque, respectivement, 10 et 15 ans. Devant leur maison et sur la nationale qui à l'époque, rentrait dans Igoville même, des tirailleurs sénégalais sont postés. Des Corses servent un canon de 47mm, des tirailleurs sont planqués dans des tranchées qui permettent l'écoulement de l'eau lors des orages, sur le bord de la route. Nous ne sommes pas loin du pontceau qui passait et qui passe encore sous la nationale et permettait d'évacuer l'eau des orages.
Nos deux jeunes sont sans doute couchés. Il est près de minuit, le 9 Juin.
C'est le jour de la communion à Igoville, communion de Michel. Mais le combat va commencer. De nombreux réfugiés sont sur les routes, dans un désordre indescriptible pour passer sur la rive gauche de la Seine, par le pont de Pont-de-l’Arche. Les Corses voient à une cinquantaine de mètres le char allemand. L'objectif est atteint, le char est immobilisé. Trois allemands sortent du tank et sont touchés par le fusil mitrailleur d'un tirailleur sénégalais. Ils seront enterrés près de leur char et leur tombe ne sera relevée que deux ans plus tard et les corps emmenés à St-André-de-l’Eure.
Deux autres allemands sortent du tank et réussissent à progresser en tuant le serveur du fusil-mitrailleur.
Sept sénégalais seront tués dans le combat, sept autres seront faits prisonniers. Mais les Allemands n'aiment pas les Noirs. Bien que les soldats se font fait prisonniers, les Allemands vont les tuer d'une balle dans la tête et ensuite les égorger. Six étaient dans le poulailler de Mme BENARD qui deviendra plus tard la forge HAMELOT.
Les Allemands ont fait monter un soldat noir sur une chaise, devant le monument aux morts, il y est resté de sept heures à vingt heures et ils l’ont tué à bout portant. Les gens assistent à la scène.
Des sentinelles allemandes montent la garde près du cadavre d'un officier allemand, à la porte du café.
Les lieux n’ont guère changé depuis plus de 50 ans. Maurice est réquisitionné par les Allemands pour enterrer les morts. Pour les Sénégalais, morts aussi,
la tombe sera une fosse commune. Quatorze cadavres à pleurer. Le trou n’est pas assez grand. Maurice jettera de la terre sur les corps avec l’aide de M. DELAPORTE père et de M. QUENOR. Tous trois enterrent des chevaux de la ferme Blondel aux Authieux que l’on verse dans un ravin et que l’on recouvre de terre.
L’enfant Michel DELAPORTE, le jeune Maurice OZANNE se souviennent parfaitement de ces moments tragiques, en revenant sur les lieux.
Les ponts de Pont-de-l’Arche, d’Elbeuf et de Oissel, dans cette nuit de juin mouvementée sautèrent au nez des Allemands dont la progression fut quelque peu ralentie.
🔸 Extrait du journal des marches et opérations du Vème groupe du 208ème R.A.C.L.D. pour la journée du 09 juin 1940
La colonne hippo est arrêtée à ALIZAY sur la route, à environ 250 mètres de l'embranchement qui mène au Pont de l'Arche, derrière une colonne de véhicules autos appartenant à des formations d'artillerie. D.C.A et antichars - en tête de colonne se trouvent les side-cars et autos-mitrailleuses d'un groupe franc de cavalerie commandé par le Capitaine HUET (Groupe frane de cavalerie n°4).
La voiture de liaison de l’E.N.G. est tout à fait en tête de colonne à ALIZAY, presque à hauteur de l'embranchement de la route, qui mène au Pont de l'Arche. Le commandant du Vème Groupe accompagné de son Capitaine adjoint attend les ordres.
Aux environs de 5 heures 30 des détachements ennemis installés sur la crête au Nord de la route ouvrent des feux de mitrailleuses sur la colonne. On aperçoit distinctement dépassant la crête les coupoles des chars ennemis.
Le Commandant du Vème Groupe se met en rapport avec le Capitaine HUET Commandant le Groupe franc de cavalerie. Ce dernier a, depuis la veille, reçu des ordres concernant la résistance en ce point. Ils décident d'organiser une résistance par tous les éléments de la colonne jusqu'à épuisement des munitions et de détruire ou incendier ensuite le matériel.
Le Commandant POUYAT organise lui-même la résistance avec toutes les armes automatiques et individuelles dont dispose la colonne d'Artillerie du 208ème R.A.C.L. Il dirige le feu sur la crête tant que durent les munitions. Le canon qui reste de la 13ème Batterie ne peut tirer faute de place sur la route pour pouvoir être mis en batterie.
De son côté, le Capitaine Commandant le Groupe franc de cavalerie n° 4 dirige, en tête de colonne, le tir de ses engins mitrailleuses, F.M. et armes individuelles sur la crête et les chars ennemis.
Le village a 'ALIZAY et la route sur laquelle se trouve la colonne sont balayés par les feux des mitrailleuses ennemies. L'embranchement de la route du Pont de l'Arche est à son tour bombardé par des projectiles d'artillerie, vraisemblablement des minenwerfer. Les camions qui obstruent l’embranchement dont un est chargé de munitions explosent et brûlent. Des fusées incendiaires tombent à la verticale et communiquent le feu aux camions épargnés par les projectiles d'artillerie. L'explosion successive des réservoirs d'essence, des camions incendiés, forme un immense écran de feu et de fumée devant le Pont de l’Arche.
Le Lieutenant BRENEOLE de la C.R.6 est grièvement blessé à la tête par un éclat d'obus gui lui a traversé le casque. Le Brigadier SEILIAR Guérin de la C.R.6, les canonniers ASCENCIO, BONREPOS, AMIEL et ABELLO de l’E.N. du Groupe V sont blessés par balles de mitrailleuses. De nombreux blessés de toutes armes affluent au pose de secours de fortune organisé dans ALIZAY.
🔸 Rues d'Igoville en 1940
Personne civiles tuées au cours des combats du 09 Juin 1940 sur le territoire d'Igoville
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LEVASSEUR Eugène, né le 25.02.1900
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MARIETTE Jules, né le 09.11.1874
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SCHAPMAN Emilie épouse DE NICONITE, née le 27.03.1894
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GIBAUX Marie épouse DE DIJON, née le 16.07.1884
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MONSEAUT Suzanne épouse DE SERVENTIN, née le 31.12.1888
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VEROUSE Jeanne
🔸 Le 10 Novembre 1940
Le 10 Novembre 1940, la Municipalité d'IGOVILLE, dont Monsieur SANDRET était alors le Maire, pouvait procéder à un premier regroupement des tombes dans un terrain dont la situation trop discrète ne correspondait pas à ses désirs, mais qui avait été imposée par l'autorité militaire.
Les années passèrent. De la route, les automobilistes jetaient un coup d'œil blasé sur ces tombes sans grandeur, accotées contre le mur d'une grange, que quelques fils de fer séparaient d'un troupeau de vaches indifférent. Plus le temps passait, plus les gens d'IGOVILLE sentaient s'affermir en eux un sentiment de solidarité avec leurs morts, avec leurs frères lointains qu'ils n'avaient jamais connus vivants.
Toujours les modestes tombes restèrent propres, rarement dépourvues de fleurs, jamais oubliées au cours d'anciennes cérémonies du Souvenir.
🔸 Entre le 24 et 30 Avril 1958
Une somme de 21 000 Francs pour l’exhumation des militaires est votée par le conseil municipal qui sera remboursée par le Ministère des Anciens Combattants.
Entre le 24 et 30 Avril 1958, les restes glorieux de ces héros ont été transférés dans la nécropole nationale de Cambronne-lès-Ribécourt (Oise), entre Compiègne et Noyon, tandis que les restes mortels du Soldat René LEBAS ont été restitués à sa famille, qui en avait fait la demande.
Exhumation des corps des soldats et transfert dans la nécropole nationale de Cambronne-lès- Ribécourt
🔸 Numéro 19 - Du 12 au 18 mai 2005
IGOVILLE - Edition de la Dépêche
Les tirailleurs sénégalais ne sont pas oubliés
Lors de l'exposition qu'il avait organisé l'an dernier à la mairie, Claude Bourgeaux président de l'Union nationale des combattant d'Igoville avait réuni une importante documentation sur les tirailleurs Sénégalais tués à Igoville le 9 juin 1940. Gérard Saillot et son conseil municipal qui ont à cœur d'entretenir la mémoire du village ont décidé d'un commun accord avec le président de l'UNC d'inaugurer en ce 60ème anniversaire de la Victoire un passage piétonnier qui porterait le nom des tirailleurs Sénégalais en leur honneur-situé entre la rue du 8 mai et la rue des Platanes. Ainsi après avoir déposé une gerbe au monument aux morts situé derrière l'église et avant de se recueillir devant le
monument situé en face de la mairie, les anciens combattants ont gravi la rue de l'église en cours de réhabilitation afin d'inaugurer le passage des tirailleurs sénégalais
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